16.7.06

La « culture » comme composante de la stratégie d’influence

« Social learning » & « Soft power »

Certes, l’usage de formes culturelles pour imposer ou faciliter la mise en œuvre d’une influence politique n’est pas nouveau. Mais le contexte international et le raz de marée des nouvelles technologies provoque une course pour le contrôle des contenus et des contenants de l’information que l’on pourrait résumer par une sorte d’entreprise de normalisation des codes culturels, partie intégrante de la lutte d’influence pour l’hégémonie de l’après guerre froide.

Dans ce contexte, la doctrine du « soft power » est la clef de voûte de cette lutte d’influence, complémentaire de celle du « hard power » s'appliquant aux avancées technologiques et industrielles. Le soft power complète et modifie ainsi la puissance traditionnelle de contrainte et serait aujourd'hui la forme de puissance ayant le plus d'importance depuis l’avènement de la société de l’information.

Conséquence idéologique du « soft power », le « social learning » cherche à imposer une norme culturelle et à définir un référentiel de société. Le « social learning », à l’origine une méthode de marketing fondée sur l'imposition de modes de pensée, s’apparente à un formatage social à des fins d'influence avec pour objectif la conquête des « territoires mentaux ».


Le phénomène de l’interdépendance complexe

Conséquence de la mondialisation, le phénomène de l’interdépendance complexe entraîne une dépréciation de la politique de puissance traditionnelle et de la diplomatie de la canonnière. En effet, l’interconnexion économique croissante qui le caractérise et la dépendance mutuelle entre les États qu’il entraîne, rendent l’utilisation de la puissance brute de plus en plus difficile. Les États ne peuvent plus recourir à la force militaire pour contraindre leurs partenaires sans courir le risque d’être eux-mêmes négativement affectés. Si bien que les gouvernements tendent de plus en plus à percevoir la poursuite de leurs intérêts nationaux à travers des moyens classiques comme à la fois trop risquée et inopérante.

Comme évoqué plus haut, cette dynamique s’accompagne d’une réévaluation des sources de pouvoir. En effet, si la puissance brute perd de sa prépondérance c’est souvent en faveur de formes de pouvoir moins coercitives, moins tangibles et plus fongibles. L’objectif est toujours de conserver ou d’accroître son influence mais la compétition n’est plus exclusivement définie en terme de rapports de force militaire et économique.

La « révolution numérique », un des aspects de cette indépendance complexe, a effectivement créé un contexte particulièrement favorable puisque les États ont pour la première fois de leur histoire les moyens technologiques nécessaires pour entreprendre une politique culturelle massive et efficace et acquérir ainsi ce qui est appelé « le pouvoir du troisième type ». Dans cette nouvelle course à l’influence, les États capables de combiner l’attraction culturelle et la maîtrise des technologies de télécommunication sont donc considérablement avantagés.

Ainsi, la culture acquiert une importance politique considérable sur la scène internationale. Ces conditions nouvelles incitent donc les États à poursuivre leurs buts à travers des stratégies plus subtiles telles que la promotion de leur influence culturelle et la diffusion de leurs normes domestiques. De sorte que les responsables politiques vont être amenés à tourner de plus en plus leur attention vers la politique culturelle et à abandonner l’esprit de conquête au profit de la conquête des esprits. Cette approche combine beaucoup d’avantages puisqu’elle offre l’opportunité aux États de construire des réseaux de coopération et d’accroître leur influence prudemment et à l’aide de nouvelles armes technologiques.

En combinant précaution et audace, l’option offerte par le concept « d’intelligence culturelle » semble donc parfaitement adaptée à la réalité du nouvel ordre international.

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